Lorsque j'étais une petite fille au hameau du Montgombert à Ugine, les petits parisiens qui venaient passer quelques jours de vacances dans mon village appelaient les pormoniers "les saucisses vertes".

Cette charcuterie a été inventée par nos aïeux savoyards probablement pour utiliser avant l'hiver, les légumes périssables du jardin avec le lard et la coenne du cochon. Mon père utilisait encore la coenne qu'il ôtait du lard. Il la faisait blanchir et l'incorporait ensuite à la préparation. La coenne donnait au pormonier une gelée plus ou moins appréciée par l'ensemble de la famille.

Je vais essayer de vous expliquer comment on fait encore les pormoniers de blettes à Ugine.

1ère opération : Ramasser les blettes au jardin, les laver à la brosse à grande eau.

 Lavage des blettesLes poireaux

Il faut aussi ramasser et laver des poireaux

2ème opération : se réunir avec quelques compères qui ont eux aussi ramassé leurs blettes pour les blanchir à la chaudière.

Il faut juste les plonger quelques minutes dans l'eau bouillante, le temps qu'elles ramollissent.

 

Blettes blanchies à la chaudière

Attention très important : il faut ensuite mettre les blettes dans un bain d'eau froide pour les refroidir très vite, sinon elles noircissent. Une astuce à voir sur la photo suivante ; elles ont été placées dans un panier métallique. Ils sont malins ces savoyards !

Ensuite on les presse légèrement au pressoir et on les laisse égoutter toute la nuit.

Quelques minutes dans la chaudière

 

 3ème opération : le lendemain les blettes sont passées au hachoir ainsi que le lard en alternant les deux ingrédients pour bien les mélanger. Passage au hachoir des blettes et du lard

L'assaisonnement de la préparation est faite juste avant la mise en boyaux car le sel ajouté trop tôt ferait rendre de l'eau aux blettes.

 

Ajout de l'assaisonnement

La préparation est mise sur la table de travail et malaxée avec vigueur pour bien mélanger l'assaisonnement.

Puis vient le moment de la mise en boyaux à l'aide d'une machine à poussoir et de la bornette.

Mise en boules dans le poussoir

Quelques tours de manivelles et le boyau de porc est rempli.

 

Pormonniers

 

 Les pormoniers sont partagés en portions en faisant tourner le boyau sur lui-même.  

 

Le chantier

Puis Antoine dit "Tatane" attache les bouts à la ficelle en faisant un noeud, plus un noeud coulant. solide.

Antoine dit "Tatane" le spécialiste du noeud coulant pour attacher les bouts

Au fur et à mesure de la fabrication les pormoniers sont suspendus en hauteur pour le séchage

. Mise au séchage

Le séchage demande environ 5 jours avec un bon feu de bois à proximité. 

Autrefois les pormoniers étaient conservés au saindoux en topines. Au bout d'un certain temps ils devenaient aigres.

Aujourd'hui c'est plus facile de les conserver en sachets sous-vide et au fond d'un frigo ou au congélateur.

Notre recette : 

1 kg de lard découenné pour 2 kg de blettes (cuites et égouttées)

31 g de sel par kg de lard

1,5 g de poivre par kg de lard

1g de 4 épices par kg de lard

1 petit bol d'ail pour 10 kg de lard

1 kg de poireaux crus pour 10 kg de lard

Possibilité de remplacer tout ou partie du lard par de la gorge plus maigre.

(D'autres légumes sont utilisés comme le chou vert ou le chou-rave).

Garder le savoir-faire d'autrefois, au lieu de consommer de la nourriture industrielle, cela vaut la peine de se donner un peu de mal...

et c'est tellement bon les pormoniers, cuits à l'eau, à la vapeur, ou grillés.

 

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